Yoenaï 5

          Il étouffait. L’eau salée entrait partout. Il se débattait, il s’épuisait, il voulait crier mais toujours l’eau… Tout était noir. Des spirales infernales l’entrainaient vers le fond. Les chants des anges, des rires lugubres, et l’absence d’air, le cœur qui éclate…

          Il tendait les mains, se raccrochant au vide… Puis soudain, sentit une autre main dans la sienne, quelqu’un qui lui caressait le front, une voix douce qui disait :

          « Tout va bien… C’est un rêve… »

          Les cris de l’enfer cessèrent dans sa tête, l’eau disparut, ses poumons retrouvèrent de l’air, et il ouvrit brusquement les yeux.

          Il croisa le regard de Yoenaï penchée sur lui.

          « Ce n’est qu’un rêve… » le rassura-t-elle, sans cesser de lui caresser le front pour le calmer.

          Il avait du mal à retrouver son souffle, il était en nage, et il tremblait encore. L’eau, la noyade…

          Il dut s’asseoir, ne supportant pas de garder la même position que pendant son cauchemar.

          « - C’était si réel… murmura-t-il.

-          Je sais… Faut évacuer…

-          C’était pire qu’en vrai… »

          Elle hocha la tête, sans cesser de lui caresser les cheveux. Son cœur se calmait peu à peu, son souffle redevenait régulier. Mais les images le hantaient. Il posa la tête sur l’épaule de la jeune femme. Il avait tellement besoin de chaleur.

          Elle le réconforta du mieux qu’elle pouvait, le caressant doucement, en silence. Elle savait les mots inutiles. Elle le guida pour qu’il s’allonge à nouveau, la tête posée sur ses genoux. Il était bien là, protégé, entouré par le parfum de Yoenaï, rassuré par ses mains, son corps. Il n’osait pas fermer les yeux, de peur de voir resurgir les spirales cauchemardesques. Il regardait sans la voir la lampe qui brûlait faiblement sur la table.

          « Je t’ai réveillée… » murmura-t-il enfin, comme pour s’excuser.

          Il voulait aussi couper court aux délires qui envahissaient son esprit.

          Il l’entendit sourire et sentit le souffle de ses cheveux quand elle nia de la tête :

          « Ne t’en fais pas… »

          Machinalement, il se mit à caresser le genou sur lequel il avait posé sa tête. Il ne vit pas qu’elle frémissait. Il ne vit pas l’expression de son visage. Il ne sut pas qu’il la troublait.

          Plus tard, alors qu’il commençait à s’endormir, elle se leva doucement, le borda et caressa sa joue :

          « Il faut dormir maintenant… »

          Sans être tout à fait conscient, il saisit sa main :

          « Reste… »

          Elle sourit et s’assit par terre, au pied du canapé. Elle lui laissa sa main. Comme un enfant après un cauchemar, il ne voulait pas rester seul.

          Rassuré par la petite main dans la sienne, il s’endormit enfin, d’un sommeil paisible que ne vinrent plus troubler ses cauchemars.

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